Pourquoi on en parle ?

En 2016, le gouvernement Valls a beaucoup parlé du prélèvement à la source qu'il souhaitait voir instauré dès 2018. Le gouvernement PHILIPPE, fraichement élu, a décidé, de reporter ce mécanisme d'un an. Il devrait donc être activé à compter de 2019 et Bercy semble beaucoup travailler pour éviter (i) les problèmes techniques et (ii) les optimisations fiscales.

Ok, mais quel rapport avec une année blanche ?

Aujourd'hui, les revenus d'une année sont taxés l'année qui suit. Ainsi, vos revenus de l'année 2016 ont été taxés en 2017.

Mais quid des revenus de l'année 2018 si ceux de 2019 sont taxés à la source (donc en 2019) ?

C'est bien le dilemme qui a poussé (forcé) le gouvernement à mettre en place la fameuse "année blanche". Les revenus de l'année 2018 ne seront donc pas imposés pour éviter des problèmes de liquidité aux français.

Attendez de lire la suite avant de casser votre tirelire et dépenser toute l'épargne mise de côté pour payer vos impôts.

Alors en pratique, ça change quoi ?

Déjà, si on reprend la logique, vous allez bien payer l'impôt chaque année : en 2018 sur les revenus de 2017, en 2019 sur les revenus de 2019 et chacune des années suivantes l'année même de perception du revenu. Il n'y aura donc, à revenu constant, aucune différence en terme de trésorerie. Les effets se feront sentir que l'année ou vos revenus diminueront (prise de retraite, par exemple).

Et puis, le gouvernement n'a pas prévu de supprimer l'impôt, mais seulement d'offrir un crédit d'impôt égal à celui qui aurait été payé. Donc, il faudra bien déclarer ses revenus de chacune des années.

Par ailleurs, les revenus considérés comme exceptionnels seront bien imposés (plus-value de cession, dividendes exceptionnels, etc.). Inutile donc, d'envisager des montages qui viseraient à augmenter vos revenus en 2018. La notion "d'exceptionnel" est, certes, subjective mais le gouvernement prévoit de sanctionner suffisamment sévèrement les abus pour que les contribuables mesurent bien leur risque avant de tenter une optimisation (toute légale qu'elle soit). Pour les indépendant (contribuables les plus dangereux !), les revenus qui dépasseront le revenu moyen des trois dernières années seront probablement considérés comme exceptionnels. Difficile, donc, d'optimiser quoi que ce soit dans ces conditions (voir même risqué).

Mais comment seront taxés ces revenus exceptionnels ?

Ils seront imposés au taux moyen d'imposition et non dans les tranches basses ou hautes du barème progressif. Il pourrait donc être intéressant pour certains contribuables de prévoir quelques revenus complémentaires en 2018. J'en ai perdu certains ?

Le barème progressif

Vos revenus sont imposés à des taux différents selon les tranches. Ainsi, pour 2017, vos 9 807 premiers euros ne seront pas imposés. Ensuite, les revenus compris entre 9 807 et 27 086 euros seront taxés à 14 %, et ainsi de suite jusqu'à 45 % pour les revenus qui dépassent 153 783 euros. Une surtaxe existe pour les contribuables dont le revenu dépasse 250 000 euros.

Mettons fin à une légende urbaine : il n'y a pas d'effet de seuil. Les revenus au-dessus de chaque seuil sont imposés dans la tranche supérieure mais les revenus inférieurs au dit seuil restent bien imposés dans la tranche inférieure. Personne ne paye d'impôt sur les 9 807 premiers euros, y compris s'il perçoit un million d'euros de revenus.

Le taux moyen d'imposition

Le taux moyen d'imposition est tout simplement la division du montant d'impôt par le montant de revenu.

Exemple : un contribuable célibataire perçoit 100 000 euros de revenus imposables. Son impôt se décompte ainsi :

De 0 € à 9 807 € taxés à 0 % soit 0 €

De 9 807 € à 27 086 € taxés à 14 % soit 2 419,06 €

De 27 086 € à 72 617 € taxés à 30 % soit 13 659,30 €

De 72 617 € à 100 000 € taxés à 41 % soit 11 227,03 €

Soit un impôt total de 27 305 euros.

Dans ces exemples, la tranche marginale d'imposition (tranche la plus haute) est 41 % et le taux moyen est 27 305 / 100 000 = 27,3 %.

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Donc, les revenus exceptionnels seront taxés au taux moyen. Les plus malins constateront alors qu'il peut quand même y avoir un intérêt à percevoir des revenus exceptionnels en 2018 : si nous reprenons notre exemple avec 10 000 euros de revenus exceptionnels en plus, nous aurions le tableau suivant :

De 0 € à 9 807 € taxés à 0 % soit 0 €

De 9 807 € à 27 086 € taxés à 14 % soit 2 419,06 €

De 27 086 € à 72 617 € taxés à 30 % soit 13 659,30 €

De 72 617 € à 110 000 € taxés à 41 % soit 15 327,03 €

Soit un impôt total de 31 405 euros et un taux moyen d'imposition de 28,55 % (31 405 / 110 000).

Donc, dans cet exemple, le contribuable qui a attendu l'année blanche pour se verser 10 000 euros de revenus exceptionnels se verra taxer sur cette somme à hauteur de 2 855 euros au lieu de 4 100 euros. Il économise donc 1 245 euros dans cette opération.

Et mes réductions d'impôt ?

Les crédits et réductions d'impôt seront remboursés au contribuable, comme s'ils lui avaient bénéficiés. Attention toutefois aux déductions du revenu global qui, elles, en l'absence de revenus exceptionnels, seront perdus.

Réduction, crédit, déduction ?

La réduction d'impôt est une somme qui peut être déduite de l'impôt calculé, mais contrairement au "crédit d'impôt", elle est plafonnée au montant de l'impôt dû. Il s'agit par exemple des réductions au titre des dons réalisés au cours de l'année fiscale ou bien de l'investissement outre-mer dit "Girardin".

Le crédit d'impôt, lui, peut donner lieu à un remboursement de la part de l'administration s'il dépasse le montant de l'impôt dû. Il s'agit par exemple du crédit d'impôt accordé pour l'emploi de salariés à domicile lorsque les déclarants 1 et 2 exercent chacun une activité professionnelle.

Enfin lorsque l'on parle de déduction du revenu global, il s'agit de réduire le revenu imposable avant de le soumettre au barème progressif. Il s'agit par exemple des sommes versées sur un PERP (épargne retraite) ou bien des crédits d'impôt pour la transition énergétique (CITE).

Pour conclure, si les contours de cette année blanche restent à définir, il est essentiel de réfléchir dès aujourd’hui à vos projets patrimoniaux avec un horizon de trois ans et d'inclure cet aspect fiscal essentiel dans votre réflexion.